Avis du maire sur les demandes de permis de construire en l’absence de PLU

Avis du maire sur les demandes de permis de construire en l’absence de PLU

Dans les communes dépourvues d’un plan local d’urbanisme, le maire peut modifier l’avis qu’il a formulé sur la demande de permis jusqu’à ce que le projet de décision lui soit communiqué par le service de l’Etat chargé de l’instruction.

Dans les communes dépourvues d’un plan local d’urbanisme, le maire peut modifier l’avis qu’il a formulé sur la demande de permis jusqu’à ce que le projet de décision lui soit communiqué par le service de l’Etat chargé de l’instruction.

Le Conseil d’Etat a rappelé que « dans les communes où l’Etat est compétent pour délivrer les permis de construire […], la décision est prise par le maire au nom de l’Etat, sauf dans les cas énumérés par l’article R. 422-2 [du code de l’urbanisme], où elle est prise par le préfet ». Au nombre des situations prévues par cet article figure l’hypothèse d’un désaccord entre le maire et le responsable du service de l’Etat chargé de l’instruction.

Dans un tel cas, le Conseil d’Etat précise que si le chef du service chargé de l’instruction « doit recueillir l’avis du maire avant de transmettre son projet de décision, avis qui est réputé favorable dans un délai d’un mois à compter du dépôt de la demande de permis, il ne résulte d’aucune des dispositions citées ci-dessus que le maire ne pourrait, avant la transmission du projet de décision […], modifier son avis ». Toutefois, le maire ne peut « en aucun cas prendre compétemment une décision en désaccord avec le projet de décision transmis par le chef du service de l’Etat dans le département chargé de l’instruction ».

Le juge d’appel a donc commis une erreur de droit en estimant que « le maire ne pouvait revenir sur son avis favorable tacite né à l’issue du délai d’un mois et qu’ainsi il n’existait pas de désaccord entre le maire et le responsable du service de l’Etat chargé de l’instruction, avant d’en déduire que le préfet n’avait pas compétence pour statuer sur la demande de permis de construire ». (CE 25 novembre 2015, n° 372045)

Cf. le texte de la décision ci-dessous:

Vu la procédure suivante :
La commune de Villard-Léger (Savoie) a demandé au tribunal administratif de Grenoble d’annuler pour excès de pouvoir l’arrêté du 13 avril 2010 par lequel le préfet de la Savoie a accordé à M. B. un permis de construire en vue de la construction d’une maison individuelle au lieu-dit La Bottière, hameau de Villard Mougin, sur le territoire de la commune. Par un jugement n° 1002518 du 15 janvier 2013, le tribunal administratif de Grenoble a annulé cet arrêté.
Par un arrêt n° 13LY00643 du 12 juillet 2013, la cour administrative d’appel de Lyon a rejeté l’appel formé par M. B. contre le jugement du tribunal administratif de Grenoble.
Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 10 septembre et 14 octobre 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, M. B. demande au Conseil d’Etat :
1°) d’annuler cet arrêt ;
2°) réglant l’affaire au fond, de faire droit à son appel ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Villard-Léger la somme de 2 500 € au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
– le code de l’urbanisme ;
– le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
– le rapport de Mme Marie Sirinelli, maître des requêtes,
– les conclusions de M. Jean Lessi, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Coutard, Munier-Apaire, avocat de M. B., et à la SCP Didier, Pinet, avocat de la commune de Villard-Léger ;
1. Considérant qu’il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. B. a sollicité un permis de construire une maison d’habitation sur un terrain lui appartenant, situé sur le territoire de la commune de Villard-Léger (Savoie) ; que le chef du service de l’Etat dans le département chargé de l’instruction s’est déclaré favorable au projet, tandis que le maire de Villard-Léger, le 30 mars 2010, postérieurement à l’expiration du délai au terme duquel son avis était réputé favorable, a émis un avis négatif ; que le préfet de Savoie a accordé le 13 avril 2010 à M. B. le permis qu’il sollicitait ; que, saisi par la commune de Villard-Léger, le tribunal administratif de Grenoble a annulé ce permis au motif qu’il émanait d’une autorité incompétente ; que, par un arrêt du 12 juillet 2013, contre lequel M. B. se pourvoit en cassation, la cour administrative d’appel de Lyon a confirmé ce jugement ;
2. Considérant que, dans les communes où l’Etat est compétent pour délivrer les permis de construire en application de l’article L. 422-1 du code de l’urbanisme, la décision est prise par le maire au nom de l’Etat, sauf dans les cas énumérés par l’article R. 422-2 du même code, où elle est prise par le préfet ; que selon le e) de cet article, la décision est prise par le préfet « en cas de désaccord entre le maire et le responsable du service de l’Etat dans le département chargé de l’instruction mentionné à l’article R. 423-16 » ; qu’aux termes du premier alinéa de l’article R. 423-72 du même code : « Lorsque la décision est de la compétence de l’Etat, le maire adresse au chef du service de l’Etat dans le département chargé de l’instruction son avis sur chaque demande de permis et sur chaque déclaration. Cet avis est réputé favorable s’il n’est pas intervenu dans le délai d’un mois à compter du dépôt à la mairie de la demande de permis […] » ; que selon l’article R. 423-74 du même code : « Le chef du service de l’Etat dans le département chargé de l’instruction adresse un projet de décision au maire ou, dans les cas prévus à l’article R. 422-2, au préfet. / Dans les cas prévus à l’article R. 422-2, il en adresse copie au maire […] » ;
3. Considérant que si le chef du service de l’Etat dans le département chargé de l’instruction doit recueillir l’avis du maire avant de transmettre son projet de décision, avis qui est réputé favorable dans un délai d’un mois à compter du dépôt de la demande de permis, il ne résulte d’aucune des dispositions citées ci-dessus que le maire ne pourrait, avant la transmission du projet de décision prévue à l’article R. 423-74, modifier son avis ; qu’il ne peut, en revanche, en aucun cas prendre compétemment une décision en désaccord avec le projet de décision transmis par le chef du service de l’Etat dans le département chargé de l’instruction ;
4. Considérant qu’il suit de là que la cour administrative d’appel de Lyon a commis une erreur de droit en jugeant que le maire ne pouvait revenir sur son avis favorable tacite né à l’issue du délai d’un mois et qu’ainsi il n’existait pas de désaccord entre le maire et le responsable du service de l’Etat chargé de l’instruction, avant d’en déduire que le préfet n’avait pas compétence pour statuer sur la demande de permis de construire déposée par M. B. ;
5. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que M. B. est fondé, sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens de son pourvoi, à demander l’annulation de l’arrêt qu’il attaque ;
6. Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de la commune de Villard-Léger le versement de la somme de 2 500 € à M. B. au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ; que les mêmes dispositions font obstacle à ce qu’il soit fait droit aux conclusions de la commune présentées au même titre ;
Décide :
Article 1er : L’arrêt de la cour administrative d’appel de Lyon du 12 juillet 2013 est annulé.
Article 2 : L’affaire est renvoyée à la cour administrative d’appel de Lyon.
Article 3 : La commune de Villard-Léger versera à M. B. la somme de 2 500 € au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Les conclusions de la commune de Villard-Léger présentées au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. B., à la commune de Villard-Léger et à la ministre du logement, de l’égalité des territoires et de la ruralité.