Droits conférés par un certificat d’urbanisme

Droits conférés par un certificat d’urbanisme

Le Conseil d’Etat apporte par un arrêt des précisions importantes sur les droits que confère un certificat d’urbanisme dans le cadre de l’article L. 410-1 du code de l’urbanisme.

Le Conseil d’Etat apporte par un arrêt des précisions importantes sur les droits que confère un certificat d’urbanisme dans le cadre de l’article L. 410-1 du code de l’urbanisme. Le Conseil précise ainsi tout d’abord que le bénéfice d’un certificat d’urbanisme peut être invoqué par une autre personne que celle qui l’a demandé. Il estime en effet que les dispositions de l’article L. 410-1 du code de l’urbanisme « ne réservent pas à la personne qui a présenté la demande de certificat les droits qu’il confère, pendant dix-huit mois, à l’application des dispositions d’urbanisme, du régime des taxes et participations d’urbanisme et des limitations administratives au droit de propriété existant à la date du certificat d’urbanisme ».
Second apport: le pétitionnaire d’un permis de construire peut profiter du certificat d’urbanisme même si celui-ci a été délivré après le dépôt de sa demande car, selon le Conseil d’Etat, « aucune disposition n’exclut la prise en compte d’un certificat d’urbanisme pour l’examen d’une demande d’autorisation ou d’une déclaration préalable déposée antérieurement à la délivrance de ce certificat et n’ayant pas encore donné lieu à décision de l’autorité administrative ».
La troisième précision que comporte cet intéressant arrêt est que « les dispositions du quatrième alinéa de l’article L. 410-1 du code de l’urbanisme sont applicables à une demande d’autorisation déposée dans le délai de dix-huit mois à compter de la délivrance d’un certificat d’urbanisme, sans qu’y fasse obstacle la circonstance que le demandeur ne s’en est pas expressément prévalu lors de l’instruction de sa demande ». (CE 15 décembre 2015, n°374026)

Cf. le texte intégral de cet arrêt:

Vu la procédure suivante :
La SCI Saint-Cergues-Les-Hutins a demandé au tribunal administratif de Grenoble d’annuler pour excès de pouvoir l’arrêté du 3 octobre 2011 par lequel le maire de Saint-Cergues (Haute-Savoie) a refusé de lui délivrer un permis de construire. Par un jugement n° 1106179 du 28 février 2013, le tribunal administratif de Grenoble a annulé l’arrêté du 3 octobre 2011 et enjoint à la commune de Saint-Cergues de statuer à nouveau sur la demande de permis de construire de la SCI dans un délai de trois mois.
Par un arrêt n° 13LY01052 du 15 octobre 2013, la cour administrative d’appel de Lyon a rejeté l’appel formé contre ce jugement par la commune de Saint-Cergues.
Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un nouveau mémoire, enregistrés les 16 décembre 2013, 12 mars 2014 et 23 décembre 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, la commune de Saint-Cergues demande au Conseil d’Etat :
1°) d’annuler cet arrêt ;
2°) réglant l’affaire au fond, de faire droit à son appel ;
3°) de mettre à la charge de la SCI Saint-Cergues-Les-Hutins la somme de 5 000 € au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
– le code de l’urbanisme ;
– le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
– le rapport de Mme Florence Marguerite, maître des requêtes en service extraordinaire,
– les conclusions de M. Rémi Decout-Paolini, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Baraduc, Duhamel, Rameix, avocat de la commune de Saint-Cergues, et à la SCP Odent, Poulet, avocat de la SCI Saint-Cergues-Les-Hutins ;
1. Considérant qu’il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par un arrêté du 3 octobre 2011, le maire de la commune de Saint-Cergues (Haute-Savoie) a refusé de délivrer à la SCI Saint-Cergues-Les-Hutins le permis de construire qu’elle sollicitait en vue de la construction, au lieu-dit « Les Hutins », d’un ensemble immobilier composé de vingt-cinq maisons individuelles et de trois bâtiments d’habitation collectifs ; qu’à la demande de la SCI, le tribunal administratif de Grenoble a, par un jugement du 28 février 2013, annulé ce refus de permis de construire ; que la cour administrative d’appel de Lyon a rejeté l’appel formé par la commune contre ce jugement par un arrêt du 15 octobre 2013, contre lequel la commune de Saint-Cergues se pourvoit en cassation ;
2. Considérant qu’aux termes de l’article L. 410-1 du code de l’urbanisme : « Le certificat d’urbanisme, en fonction de la demande présentée : / a) Indique les dispositions d’urbanisme, les limitations administratives au droit de propriété et la liste des taxes et participations d’urbanisme applicables à un terrain ; / b) Indique en outre, lorsque la demande a précisé la nature de l’opération envisagée ainsi que la localisation approximative et la destination des bâtiments projetés, si le terrain peut être utilisé pour la réalisation de cette opération ainsi que l’état des équipements publics existants ou prévus. / Lorsqu’une demande d’autorisation ou une déclaration préalable est déposée dans le délai de dix-huit mois à compter de la délivrance d’un certificat d’urbanisme, les dispositions d’urbanisme, le régime des taxes et participations d’urbanisme ainsi que les limitations administratives au droit de propriété tels qu’ils existaient à la date du certificat ne peuvent être remis en cause à l’exception des dispositions qui ont pour objet la préservation de la sécurité ou de la salubrité publique […] » ;
3. Considérant, en premier lieu, que ces dispositions ne réservent pas à la personne qui a présenté la demande de certificat les droits qu’il confère, pendant dix-huit mois, à l’application des dispositions d’urbanisme, du régime des taxes et participations d’urbanisme et des limitations administratives au droit de propriété existant à la date du certificat d’urbanisme ; que, par suite, en jugeant que le bénéfice des certificats d’urbanisme délivrés à deux des propriétaires des parcelles d’assiette du projet pouvait être invoqué par la SCI Saint-Cergues-Les-Hutins, la cour administrative d’appel de Lyon n’a pas commis d’erreur de droit ;
4. Considérant, en deuxième lieu, que les dispositions citées ci-dessus de l’article L. 410-1 du code de l’urbanisme prévoient le délai maximal dans lequel une demande d’autorisation ou une déclaration préalable doit être déposée à la suite de la délivrance d’un certificat d’urbanisme pour pouvoir bénéficier de l’application des dispositions d’urbanisme, du régime des taxes et participations d’urbanisme et des limitations administratives au droit de propriété existant à la date du certificat d’urbanisme ; qu’en revanche, aucune disposition n’exclut la prise en compte d’un certificat d’urbanisme pour l’examen d’une demande d’autorisation ou d’une déclaration préalable déposée antérieurement à la délivrance de ce certificat et n’ayant pas encore donné lieu à décision de l’autorité administrative ; que, par suite, en jugeant que le bénéfice des certificats d’urbanisme délivrés le 21 janvier 2011 pouvait profiter à la demande de permis de construire déposée le 22 novembre 2010, d’ailleurs confirmée le 4 juillet 2011, la cour n’a pas commis d’erreur de droit ;
5. Considérant, en troisième lieu, que les articles R. 431-4 et suivants du code de l’urbanisme énumèrent de façon limitative les documents qui doivent être joints à la demande de permis de construire, sans exiger la production des certificats d’urbanisme portant sur le terrain d’assiette du projet ; que les dispositions du quatrième alinéa de l’article L. 410-1 du code de l’urbanisme sont applicables à une demande d’autorisation déposée dans le délai de dix-huit mois à compter de la délivrance d’un certificat d’urbanisme, sans qu’y fasse obstacle la circonstance que le demandeur ne s’en est pas expressément prévalu lors de l’instruction de sa demande ; que, par suite, en jugeant que, alors même que la SCI Saint-Cergues-Les-Hutins ne s’était pas expressément prévalue, dans le cours de l’instruction de sa demande de permis de construire, des certificats d’urbanisme délivrés le 21 janvier 2011 portant sur le terrain d’assiette de son projet, la modification du classement de ce terrain, résultant de la modification du plan local d’urbanisme approuvée par une délibération du conseil municipal du 12 septembre 2011, n’était pas opposable à sa demande, la cour n’a pas commis d’erreur de droit ;
6. Considérant, en quatrième lieu, qu’aux termes de l’article R. 111-21 du code de l’urbanisme : « Le projet peut être refusé ou n’être accepté que sous réserve de l’observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l’aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l’intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu’à la conservation des perspectives monumentales » ; qu’en estimant que le terrain d’assiette du projet se situait dans un quartier largement gagné par l’urbanisation et dont ni le bâti ni le paysage naturel ne présentaient d’intérêt particulier et que les immeubles projetés, dont ne résulterait pas une densité d’habitat rompant de manière significative avec le tissu bâti environnant, n’affecteraient pas sensiblement la qualité des vues sur le paysage lointain, la cour a porté sur les faits de l’espèce une appréciation souveraine exempte de dénaturation ;
7. Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que la commune de Saint-Cergues n’est pas fondée à demander l’annulation de l’arrêt qu’elle attaque ;
8. Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu’une somme soit mise à la charge de la SCI Saint-Cergues-Les-Hutins, qui n’est pas, dans la présente instance, la partie perdante ; qu’il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de la commune de Saint-Cergues le versement à cette SCI d’une somme de 3 000 € au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DECIDE :
Article 1er : Le pourvoi de la commune de Saint-Cergues est rejeté.
Article 2 : La commune de Saint-Cergues versera une somme de 3 000 € à la SCI Saint-Cergues-Les-Hutins au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la SCI Saint-Cergues-Les-Hutins et à la commune de Saint-Cergues.